La douleur et les émotions - Alinéa Santé

La douleur et les émotions

Savez-vous que la douleur est décrite comme étant : << une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à un dommage tissulaire ou potentiel >>  ? Si l’on en croit cette définition, ce sont des expériences tout à fait personnelles teintées entre autres par les épreuves passées, l’éducation, la sensibilité et les préoccupations d’un individu. Il est donc erroné de croire que nos douleurs sont purement physiques.

 

La neuroscience au service des émotions 

Nous comprenons de plus en plus les mécanismes qui amplifient les signaux douloureux dans certaines zones du cerveau. Des études récentes ont démontré que les pensées négatives et les émotions telles que l’anxiété, le deuil et un état dépressif, contribuent à amplifier les sensations douloureuses en abaissant les seuils de la douleur. C’est -à-dire que sous l’influence d’émotions négatives, une personne ressentira la douleur plus rapidement et plus intensément pour un même effort physique déployé qu’en d’autres circonstances plus joyeuses. La bonne nouvelle, c’est que l’inverse est aussi possible. Les émotions positives ont quant à elle la capacité d’élever ces seuils et repousser l’arrivée de la sensation douloureuse et ainsi diminuer l’intensité de celle-ci. C’est ce qu’on appelle la spirale d’émotions positives ! 

Spirale positive de la douleur

 

Les douleurs à court et long terme 

Le phénomène s’applique-t-il autant aux douleurs brèves qu’aux douleurs persistantes ? Bien oui ! Quand vous vous cognez l’orteil sur le bord de votre lit, l’expérience douloureuse, même si elle est de courte durée, a aussi une dimension affective. Elle peut être pénible, insupportable, désagréable et même drôle (surtout si vous êtes capable d’autodérisions dans de telles circonstances) !  Bien entendu, lorsque l’expérience douloureuse perdure des mois voire des années, les possibilités que les émotions négatives prennent le dessus sur la lésion d’origine sont d’autant plus grandes.  

La place des émotions à tendance à grandir plus la chronicité de la condition s’installe. Après un certain temps, il arrive souvent que le patient ne répond plus aux traitements et pourtant, la blessure semble guérie et résorbée. C’est fréquemment à ce moment qu’un sentiment d’impuissance envahit le patient et ainsi que le thérapeute impliqué. La douleur est pourtant indiscutable.  Elle est bien réelle chez la personne qui la vie, même si objectivement (tests physiques, radio, examens, etc.) nous n’arrivons pas à la démontrer. 

 

L’œuf ou la poule = la dépression ou la douleur ? 

50% des personnes au prise avec des douleurs chroniques connaîtront un état dépressif, qu’il soit passager ou non. Cela se comprend très bien. Du moment où vous vivez avec une condition chronique, votre vie personnelle et professionnelle sont chamboulées, la qualité de celles-ci sont diminuées ou même médiocres par épisodes, l’avenir est incertain et votre tolérance face à cette souffrance s’essouffle peu à peu. Il est tout fait humain de vivre des moments dépressifs.  

Mais si l’état dépressif était présent avant même que la douleur physique ne se manifeste ? Avec notre éducation, la pression sociale et culturelle, peut-être n’avons-nous pas l’espace ni l’environnement pour la vivre et la ressentir ? Si nous sommes incapables de nommer et de comprendre ces émotions sous-jacentes, notre corps peut-il prendre le relais à défaut de pouvoir exprimer ces émotions trop fortes ? 

 Le concept de ‘’spectre d’expression de la dépression’’ semble le démontrer. Le trouble affectif s’exprimerait par le biais de la douleur chronique à défaut de le faire autrement. 

 

Quand la souffrance physique est plus acceptable que la souffrance mentale 

Bien que je me spécialise au niveau de la douleur physique, je rencontre et accompagne des êtres humains à part entière.  

Lors de mes rencontres initiales à domicile avec un nouveau client, je leur demande à quel moment les douleurs ont apparues ou augmentées. S’ils vivaient (ou vivent encore) une situation particulièrement stressante dans leur vie à ce moment là. Vous seriez surpris à quel point notre corps nous parle ! 

Voici 3 exemples dont j’ai été témoin. J’ai volontairement abrégé et modifié les histoires afin de respecter la vie privée de ces personnes. Le but étant de vous montrer des situations variées qui peuvent affecter notre santé sournoisement. 

1 – Après son congé de maternité, une jeune maman retourne à son travail et se blesse au cou dans le cadre de celui-ci, deux semaines seulement après son retour. Sa condition ne s’améliore pas malgré les traitements conventionnels, les semaines et les mois qui passent. Se pourrait-il que le retour au travail fût trop tôt pour elle, sachant qu’elle a trois jeunes enfants et en plus d’un travail exigeant ?

2 – Une femme dans la quarantaine est aidante naturelle auprès de son père malade. Dans les semaines qui ont suivi le décès de celui-ci, des douleurs invalidantes au dos et au bassin l’affligent et ne la quittent plus. Pourtant elle n’avait ressenti aucune douleur durant toutes ces dernières années éprouvantes. Est-ce que ce temps d’arrêt forcé lui permettrait de vivre enfin son deuil et prendre soin d’elle sans culpabilité ?

3 – Une femme d’âge mûre souffre d’une capsulite calcifiante sévère qui l’empêche de bouger et de dormir.  Elle traverse une séparation difficile avec son mari et vit beaucoup de colère. Plus elle lâche prise sur la situation et qu’elle choisit de prendre sa vie en main, plus sa condition s’améliore de façon impressionnante. 

En tant que société, nous acceptons plus facilement de palier à des arrêts de travail dus à des maladies et blessures qui touchent le corps physiques, plutôt que ceux qui découlent de troubles affectifs. Si nous pouvions tous avoir des moments pour gérer la perte d’un être cher, un changement important dans notre vie conjugale ou familiale, peut-être que notre corps physique s’en porterait mieux à long terme. C’est mon avis. Une opinion bien personnelle, qui j’espère, fera du chemin dans la tête de plusieurs.

 

S’arrêter pour mieux repartir 

Sans mettre toutes les épisodes de douleurs sur le dos des émotions, je crois que parfois, elles nous donnent l’opportunité de s’arrêter et de se questionner sur nos choix et la direction que prend notre vie. C’est comme un baromètre à bonheur.  

Si la douleur est juste le résultat de votre maladresse (comme moi qui se blesse en débarquant d’un remonte pente dans une station de ski), votre attitude vous aidera sûrement à diminuer l’intensité et la durée de celle-ci. Dites-vous qu’il y aura d’autres hivers pour en profiter ou que vous manquiez justement de temps pour terminer votre roman de 1000 pages que vous avez débuté au début de l’hiver…

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